Atchoum ! Le stress au travail serait aussi contagieux que le rhume

29 nov 2023

4 min

Atchoum ! Le stress au travail serait aussi contagieux que le rhume
autor
Romane Ganneval

Journaliste - Welcome to the Jungle

colaborador

Vous l’ignorez peut-être encore, comme le rhume le stress s’attrape dans l’air. Mais alors comment s’en prémunir en open space ?

Que l’on croit ou non aux énergies, il nous arrive parfois d’aimer immédiatement une personne qu’on vient de rencontrer ou, au contraire, de ne pas en sentir une autre. Ici, pas question d’odeur corporelle, mais de chimie. C’est peut-être encore plus flagrant quand deux peaux s’effleurent pour la première fois et semblent se compléter ou ne pas du tout s’accorder. Effet repoussoir immédiat. Mais ces réactions inexpliquées et inexplicables, ne sont-elles pas une façon inconsciente de nous protéger ? Cette théorie est d’autant plus intéressante que d’après des recherches récentes publiées en 2023 dans le Journal of Personality and Social Psychology, le stress serait aussi contagieux qu’un rhume. Concrètement, il suffirait de côtoyer d’un peu trop près une personne stressée pour en être atteint à son tour. Une question se pose : à quand le retour des distances physiques de sécurité dans l’open space ?

Le cerveau favorise la contagion d’émotions négative

Trêve de plaisanterie de mauvais goût. Vous vous demandez sûrement pourquoi le stress nous atteint si facilement ? Selon les résultats de l’étude en question, l’être humain a la fâcheuse habitude d’assimiler, voire de calquer ses émotions sur les personnes qu’il fréquente. Ce n’est pas nouveau, le stress déclenche la libération de cortisol dans le corps - une hormone dont le rôle est de réguler l’organisme lors d’une situation nouvelle ou qu’il juge dangereuse -, qui en plus d’augmenter la vigilance, de baisser les défenses immunitaires, de rendre nerveux ou irritable est extrêmement volatile, puisque même les chiens de propriétaires stressés seraient atteints d’anxiété. Vous le savez déjà, l’humain est un animal comme les autres ; il est donc également concerné par ce phénomène.

Plus simplement, notre cerveau animal conçu pour fuir le danger fonctionne ainsi : si, à côté de nous, une personne réagit à un événement avec tristesse, peur ou détresse, inconsciemment, on se dit que cela doit être la manière la plus appropriée de se comporter. Et même si de nos jours la peur du prédateur est moins prégnante, l’insécurité psychique demeure. Pour, Elaine Hatfield, professeure de psychologie de l’Université d’Hawaï : « La contagion émotionnelle primitive a donc un rôle adaptatif et fonctionnel qui favorise la proximité sociale dans l’espèce humaine. »

Malheureusement pour nous, ce « mimétisme » émotif n’est pas parfait, puisqu’évidemment, il concerne d’abord les émotions négatives avec en sous-texte cette idée de « facteur de survie ». « Comme le disait le psychologue Rick Hanson, le cerveau agit sur les émotions négatives comme du Velcro et sur les émotions positives comme du Téflon. Autrement dit, les émotions négatives sont beaucoup plus contagieuses que les positives et elles s’ancrent de manière plus durable », appuie Christophe Haag, auteur de l’ouvrage La Contagion émotionnelle (éd Albin Michel,2019) à Sciences et Avenir. Il est donc temps d’accepter que l’humain est fondamentalement contre l’idée de loi de l’attraction. Le mal attire le mal, c’est vrai, mais l’émotion positive est toujours surplombée par la mauvaise. C’est prouvé scientifiquement.

À ce propos, n’avez-vous jamais entendu parler de « fatigue de compassion », soit quand un soignant perd sa capacité à être empathique ou à éprouver de la compassion pour une personne souffrante parce qu’il est trop atteint psychologiquement ? Mais aussi de détresse ou d’inquiétude empathique ? Tout d’un coup, les difficultés de l’autre sont si prégnantes qu’on en vient à s’oublier totalement.

Bien se prémunir du stress de ses collègues

Maintenant, réfléchissez une seconde, quel est l’endroit où il est difficile de fuir les personnes stressées ? Si on omet les transports en commun, la route et les supermarchés, il nous reste… le travail. Comment ça, vous n’avez pas choisi vos voisins de bureau ? Eh bien, vous auriez dû. Selon une recherche, 26% des personnes qui observent quelqu’un de stressé présentent des taux de cortisol plus élevés. Maintenant, vous ne savez pas si votre collègue qui a passé un sale week-end, vous a contaminé à la machine à café ? Observez-vous et sachez reconnaître les symptômes d’une contagion émotionnelle négative : moral en berne, immunité affaiblie et bien sûr, stress. Touché ?

Heureusement pour nous, il est tout à fait possible de se prémunir du négatif des autres sans forcément rester tout le temps enfermé chez soi. Par exemple, quand vous sentez que votre corps se crispe et est soudainement pris par une vague de stress, vous pouvez pratiquer la pleine conscience. Pour cela, posez-vous les questions suivantes : quelle est l’origine de ce stress ? Ai-je de véritables raisons d’être stressé à cet instant ? Cet exercice peut aider à prendre du recul, mais aussi faciliter l’identification des personnes possiblement contagieuses de votre entourage.

Autre situation : depuis que vous avez changé de place dans l’open space, rien ne va plus ? Peut-être que les histoires de cœur malheureuses de Pierre finissent par vous peser sur le moral. Bien sûr, pas question de ne plus se soucier de lui ni de l’écouter du jour au lendemain, mais de contrebalancer cet afflux de négativité en déjeunant plus souvent avec Joachim, le fanfaron de la bande. Oui, tous les spécialistes s’accordent sur le fait que s’entourer le plus possible de personnes positives est un bon rempart contre les émotions négatives. À ce propos, il semblerait que nous soyons la moyenne des personnes que nous fréquentons le plus, alors réfléchissez-y quand vous faites du tri dans vos relations.

Enfin, être régulièrement en contact avec la nature (végétaux et animaux) réduirait sensiblement le stress, l’anxiété et la colère. Une étude menée sur les habitants de Londres révélait à ce propos que les personnes qui vivaient dans les rues les plus verdoyantes consommaient moins d’antidépresseurs. Alors la prochaine fois qu’on vous propose de vous promener dans un parc alors que vous êtes au fond du lit, forcez-vous un peu !

Dans une période où le climat refroidit et les jours raccourcissent, pensez toujours à bien vous couvrir, mais n’oubliez pas de bien choisir avec qui vous comptez vous réchauffer ces prochains mois.

Article édité par Gabrielle Predko ; Photo de Thomas Decamps

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